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Le bien-être au travail

Burn-out, gestion du stress, présentéisme ou bore-out, tous ces termes émergent quand il s’agit du monde de l’entreprise. Si la souffrance au travail n’est en soi pas un phénomène nouveau, elle est de plus en plus médiatisée.

Elisabeth Allier, fondatrice de la plateforme mieuxêtre-autravail.com et formatrice en Mindfullness (méditation de pleine conscience) nous donne sa définition du bien-être au travail et des astuces indiscensable à notre bonheur dans la sphère professionnelle.

Rédaction : Qu’est-ce qu’est le bonheur au travail ?
Elisabeth Allier : Pour moi, bonheur au travail rime avec plaisir à aller au travail. Ce « bonheur au travail » peut prendre différentes formes :

  • des relations avec des partenaires et collègues qui me font grandir professionnellement et aussi en tant qu’être humain
  • des apprentissages qui enrichissent mes compétences
  • le sens : je serai d’autant plus motivée si mon travail a de la valeur à mes yeux
  • la reconnaissance : lorsque je me démène pour un projet, que je respecte les délais, j’apprécie que mes efforts soient reconnus. Ce feedback positif contribue lui aussi à ma motivation.
  • la possibilité de m’exprimer et d’être tel que je suis, sans masque ni dans la peur de la réaction de mon entourage professionnel. Cela suppose un climat de confiance où je sais que je ne serai pas jugé si par exemple mon avis diffère de la majorité.

Je ne crois pas en une entreprise où le bonheur serait continu, il y a bien sûr des journées plus difficiles mais dans l’ensemble, la notion de plaisir doit être présente.

Qu’est-ce qui est perçu comme un faux bonheur au travail ?

« Un faux bonheur au travail » serait une entreprise qui propose des ateliers « bien-être » pour se donner bonne conscience. Ou bien une entreprise qui pratique un double discours en interne, incitant à lever le pied ou à souffler, mais qui ne propose aucune solution concrète pour diminuer la charge de travail et le stress inhérent.

Quand je présente mes ateliers en entreprise, j’explique que je ne viens pas avec une baguette magique. Je propose une pratique qui remet l’humain au cœur de la structure, qui l’aide à mieux vivre avec les enjeux du travail tout en l’ouvrant à ce qui fonctionne et lui plait et que souvent, stressé, il ne voit plus. Si cette vision n’est pas partagée par l’entreprise, la pratique de la Mindfulness perd son sens.

Est-ce que la souffrance au travail est quelque chose de nouveau, que les Millenials ou Génération Y ont mis en exergue en arrivant sur le marché du travail ?

La souffrance au travail a toujours existé, moi-même ayant travaillé dans une banque, j’ai connu une forte charge de travail, un tiraillement entre les objectifs à réaliser et les besoins de mes clients, l’absence de soutien voire une exigence démesurée de certains managers. Je devais composer avec, tant bien que mal. J’ai le sentiment que la priorité des quadras d’aujourd’hui (j’ai 46 ans) était alors de « bien faire », d’évoluer, de « faire carrière » sans vraiment se préoccuper de leur bien-être. Je dis « étais » car je trouve que nous aussi commençons à changer, à voir notre travail comme un lieu possible d’épanouissement.

La nouvelle génération nous invite à repenser les valeurs de l’entreprise, à remettre au centre du débat des thèmes comme équilibre vie personnelle et professionnelle, intérêt pour son travail, qualité de vie. Sous l’impulsion de cette nouvelle génération, les RH sont amenées à réfléchir à de nouveaux moyens pour attirer ou conserver les talents. La rémunération seule ne suffit plus à empêcher le turnover, le départ de salariés déçus.

Quels sont les symptômes d’un mal-être au travail qui doivent alerter l’entreprise ?

Du point de vue des managers et des RH, il s’agit d’être vigilant quant au désengagement d’un salarié, qui peut s’exprimer par un désintérêt de ses tâches, un manque de participation, un absentéisme répété voire un risque de bore-out.

A l’inverse, un salarié qui se surinvestit peut également se sentir mal au travail. Il s’agit souvent de personnes qui ont à coeur de mener à bien leur mission, multiplient les heures au travail, réduisent la ligne de démarcation entre vie personnelle et vie professionnelle. Or, le corps a besoin de repos. Se surinvestir dans le travail sur la durée, c’est prendre le risque de s’épuiser voire de sombrer (burn-out).

Et comment reconnaître en tant que salarié les premiers symptômes d’un mal-être ? Est-ce que cela peut s’exprimer par un manque d’appétit, des nuits agitées ou des crises de colère ?

Ce mal-être peut prendre différentes formes : on s’emporte de façon démesurée, on connait des sauts d’humeurs, on a du mal à réguler ses émotions. On peut en effet perdre l’appétit ou à l’inverse se mettre à grignoter à l’excès, avoir du mal à dormir, avoir des maux récurrents (ventre, dos, tête)…

Le corps envoie des messages d’alerte. Encore faut-il les écouter. Voilà pourquoi, il est important de se désengager de temps en temps du mental, des injonctions qu’on a tendance à se répéter « Il faut, je dois à tout prix boucler ce dossier » pour se reconnecter à son corps et écouter les signes qu’il nous envoie

Les personnes qui ont vécu un burn-out ont souvent laissé leur mental les guider, au détriment de leur corps. La tête dans le guidon, elles n’ont pas su prendre en compte ces indicateurs de mal-être. C’est vrai que lorsqu’on évolue dans un environnement stressant avec des exigences fortes voire démesurées, ce n’est pas évident…

Et c’est à ce moment que le coaching intervient ?

Non, pas tout à fait. Le coaching n’est pas une solution miracle qui résout les problèmes d’un coup de baguette magique.

Tout d’abord, si on se sent mal dans son travail, il faut si possible en discuter avec son N+1. On peut être confronté à un manager complètement fermé. Dans ce cas, on peut s’adresser à d’autres interlocuteurs, comme les RH ou le médecin du travail.

Mon rôle, en tant que formatrice en Mindfulness, est de proposer des exercices pour aborder les enjeux au travail avec plus de fluidité. Avec plusieurs bénéfices à la clef : revenir dans le moment présent, moins se laisser entraîner par ses pensées « parasites » (ruminations, anticipations anxieuses) ou ses émotions déstabilisantes, être plus à l’écoute de son ressenti corporel, stabiliser son attention qui souvent vagabonde dans le passé, le futur, l’imaginaire…

Quel est le profil des gens qui viennent vous trouver ? Et pourquoi avez-vous orienté vos formations plutôt pour les femmes ?

Quand je travaillais en tant que salariée, je vivais sur un rythme effréné, j’avais la tête dans le guidon, j’étais stressée. Naturellement, j’ai eu envie de m’adresser à la femme que j’ai été.

Il me semble que les femmes s’intéressent davantage à la Mindfulness (elles sont en tout cas largement majoritaires aux conférences auxquelles j’assiste). Elles sont peut-être plus à l’aise pour parler de leurs émotions, curieuses de découvrir des pratiques qui vont les aider dans leur quotidien…

Toutefois, même si l’essentiel des personnes que j’accompagne sont des femmes, aujourd’hui, des hommes commencent à assister à mes ateliers ou suivent mon programme par SKYPE, dont des scientifiques.

Je remarque aussi un intérêt pour les jeunes : bacheliers entre 17 et 18 ans ou étudiants qui souhaitent stabiliser leur attention souvent mise à mal par le digital et gérer leur stress avant un oral, un examen, concours…

Quel serait pour vous, la vision idéale du monde du travail ?

Il s’agirait d’un monde avec une vision commune et partagée entre salariés et actionnaires. L’humain serait considéré comme le capital le plus précieux, évoluant en confiance dans un environnement stimulant où il peut exprimer sa créativité, ses idées, exercer ses talents, dans le respect du monde qu’il entoure (prendre soin de notre planète et nos ressources) et des personnes qu’il côtoie.

Cela ne veut pas dire que tout serait lisse, qu’il n’y aurait pas de différends. Mais on pourrait confronter ses points de vue, faire des ajustements sans crainte d’être étiqueté ou non écouté.

Proposer des exercices de Mindfulness à de jeunes étudiants en Ecoles de Commerce (les managers de demain) s’inscrit dans cette démarche. Ces jeunes ont souvent la tête bien remplie mais restent démunis face à leurs émotions ou celles des autres (plus tard, leurs futurs collaborateurs). Par ailleurs, dans un monde du diktat du « Tout est urgent », il devient essentiel d’apprendre à se poser, se recentrer, ne pas se laisser happer par des sollicitations de toute part, notamment en lien avec le digital. Pour faire le tri entre l’urgent et l’important, pour choisir où porter son attention et ainsi gagner en sérénité et efficacité.

En proposant des exercices à des jeunes (les enfants des femmes que j’ai accompagnées), je me suis rendu compte à quel point ils sont réceptifs et apprécient de se poser, de souffler, de moins partir dans leur réaction immédiate.

Certaines écoles en France commencent à s’ouvrir à la Mindfulness. C’est le cas de l’ESSCA d’Angers. Son directeur pédagogique Stéphane Justeau a ainsi proposé des exercices d’entraînement de l’attention à ses étudiants fin 2017. Leur retour a été enthousiaste.

Avez-vous trois astuces à donner pour se déstresser pendant une journée ?

  1. La cohérence cardiaque
    Notre respiration est une précieuse alliée. En particulier, en situation de stress, on peut inspirer et expirer profondément. Ce n’est pas vraiment un exercice de Mindfulness, on parle davantage de cohérence cardiaque. C’est efficace et accessible, voilà pourquoi, je le propose volontiers.
  2. Micro-pause
    Pratiquer des micro-pauses tout au long de sa journée est un moyen efficace de tenir sur la durée. L’exercice est très simple : il s’agit de suivre ses 3 prochaines respirations, par exemple entre 2 activités, 2 RDV, en situation d’attente (sur le quai du métro, au feu rouge…). On s’ancre ainsi dans l’instant présent, on se reconnecte à son corps
  3. Pratiquer une activité en pleine conscience
    En revenant dans l’instant présent, on se laisse moins entraîner par notre « radio FM », on développe une relation plus apaisée avec nos pensées.

On peut revenir dans l’instant présent en choisissant une activité, un moment dans sa journée : café ou thé du matin, quand on applique sa crème hydratante sur le visage, quand on est sous la douche…. Et décider de le vivre pleinement, esprit et corps connectés, en portant son attention sur ses sens : toucher, odorat, ouïe, vue…

Et si des pensées s’invitent (il n’y a rien d’anormal à cela, notre cerveau est fait pour penser), on les laisse passer, on revient à ce moment, à nos sensations physiques.

En ritualisant ce moment, on contribue à son bien-être.

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